Filières énergétiques et effort sportif sont très liés. Sans énergie, impossible de solliciter nos muscles. Nous avons ainsi tous mangé un bon plat de pates la veille d’une course. Mais finalement pourquoi ? Lorsque l’on court un marathon, on connaît souvent le mur du trentième kilomètre. Qu’est ce qui arrive à notre corps à ce moment là ? Quand on se lance en ultra trail, on se demande souvent ce qu’il va se passer quand on n’aura plus d’énergie. Et pourtant, alors que la course est déjà très entamée, on arrive à courir avec la même force que quelques dizaines d’heures plus tôt. Comment est-ce que cela se fait ?
Pour répondre à ces questions, il faut comprendre ce que sont les différentes filières énergétiques qui permettent à notre corps et à nos muscles d’être alimentés en combustible. Découvrir cela, c’est aussi mieux comprendre son corps et mieux se préparer aux différents types d’effort. Je vous explique tout dans cet article.
Apport en énergie des muscles
Les muscles pour fonctionner ont besoin de carburant. Cette énergie se matérialise sous la forme d’ATP pour adénosine triphosphate. Cependant, les réserves d’ATP emmagasinées dans l’organisme sont très faibles. En effet, l’ATP est une molécule très lourde qu’il est impossible de stocker en grande quantité. Il faut donc en générer pendant l’effort.
Pour cela, plusieurs filières énergétiques sont possibles. Mais toutes ne permettent pas de générer la même intensité énergétique, la même puissance. Et surtout, chaque voie ne permet pas de produire de l’ATP indéfiniment. Au final, trois filières énergétiques peuvent être distinguées. Deux sont dites anaérobies car ne nécessitant pas d’oxygène, la troisième est dite aérobie :
- la filière anaérobie alactique ;
- la filière anaérobie lactique ;
- la filière aérobie.
La filière anaérobie alactique
Cette filière énergétique est ainsi désignée car elle ne nécessite pas d’oxygène et ne produit pas d’acide lactique. Vous savez, l’acide lactique est ce qui cause des courbatures le lendemain d’efforts intenses. Pour synthétiser de l’ATP, elle utilise l’ADP, issue de la dégradation de l’ATP, grâce à la phosphocréatine.
Cette filière est donc idéale par rapport aux autres filières énergétiques. Elle libère une puissance importante, n’utilise pas d’oxygène et ne génère pas de courbatures ! Mais malheureusement, le stock de phosphocréatine s’épuise très vite. Ainsi, la filière anaérobie alactique ne permet de fournir un effort que pour 20 à 30 seconde !
Cette filière énergétique est donc la filière des efforts courts comme le sprint ou le saut. Elle n’est pas très utile en trail, et encore moins en ultra- trail !
La filière anaérobie lactique
Comme la filière précédente, cette filière énergétique n’a pas besoin d’oxygène. En revanche, elle produit de l’acide lactique, ce qui a pour conséquence de générer des courbatures. Elle dégrade du glucose sans utiliser d’oxygène pour créer de l’ATP. Cela a pour avantage une rapidité importante pour libérer de l’énergie. Toutefois, la puissance dégagée reste moins importante que la filière anaérobie alactique.
Grace aux ressources importantes en glycogène, cette filière permet de générer plus longtemps de l’ATP et donc de l’énergie. En revanche, la réaction chimique produit de l’acide lactique qui libère ensuite des protons H+ responsables de l’acidité des cellules.
Cependant, le rendement de la réaction de cette filière énergétique est très faible. En effet, la réaction nécessite une grande quantité de glycogène pour créer de l’ATP. Cela ne peut donc pas tenir sur la durée. Heureusement, l’acidification du milieu due aux réactions chimiques empêchent l’organisme d’utiliser cette filière énergétique trop longtemps. Ainsi, au bout de quelques minutes, c’est la dernière des filières énergétiques qui va se mettre en route.
La filière aérobie
Cette dernière filière énergétique est la filière des efforts longs. Elle utilise de l’oxygène pour produire de l’ATP grâce à la dégradation soit de glycogène, soit de lipides (acides gras). La filière aérobie produit du CO2 et de l’eau éliminée par la sueur. De plus, la réaction est bien plus efficace que celle de la filière aérobie et nécessite donc moins de substrat. En revanche, les chaines de réaction sont plus longues et fournissent du coup moins de puissance. On est bien dans l’endurance !
Cette filière énergétique permet une réaction chimique soit à partir des glucides, soit à partir des lipides. Mais quelle est alors la différence ?
Lors d’efforts d’endurance type marathon ou trail, la première chaine de réaction qui va se mettre en route est celle dégradant le glycogène. L’utilisation de l’oxygène permet, par rapport à la filière énergétique précédente, la filière anaérobie lactique, de consommer beaucoup moins de ses réserves pour produire de l’ATP et donc de l’énergie. Cependant, les stocks de glycogène ne sont pas illimités. Quand les réserves de glycogène sont terminées, il faut trouver un autre moyen de produire de l’ATP. L’organisme utilise alors des lipides. Cependant, la réaction est beaucoup plus longue et fournit donc moins de puissance. On a alors l’impression de ne plus avoir d’énergie.
Vous avez forcément entendu parler du mur du marathon vers le 30e kilomètre. Et bien ce mur correspond au moment où l’organisme a épuisé ses réserves de glycogène. Il faut alors consommer des lipides pour fournir de l’énergie, mais c’est alors beaucoup plus difficile de maintenir la même allure. Vous vous souvenez que l’on dit toujours de manger un gros plat de pates la veille d’une course ? Ce sont ces fameux sucres lents qui permettent de faire le plein de glycogène et donc d’avoir un maximum d’énergie le plus longtemps possible.
Alors bien sûr, selon les personnes, et l’effort fourni, les réserves en glycogène s’épuiseront plus ou moins vite. Ainsi, dans un marathon, il faudra réussir à repousser le plus loin possible cette limite, et ensuite bien gérer le mur, lorsque l’organisme pourra fournir moins de puissance car commençant à dégrader les lipides pour produire l’ATP. En ultra-trail, on sait dès le départ que, sur la majeur partie de la course, l’énergie proviendra de la dégradation des lipides. Il est donc primordial de bien connaitre son corps, de l’habituer à courir via cette filière énergétique qui dégage le moins de puissance. Ce sera la condition pour réussir à courir très très longtemps !
En conclusion
Les différentes filières énergétiques correspondent donc à des types d’efforts différents. Celles qui permettent de générer le plus de puissance ne peuvent pas durer longtemps. En revanche, la filière aérobie, celle qui a besoin d’oxygène dans ses réactions chimiques, permet de maintenir un effort long. C’est la filière de l’endurance.
Vous avez donc compris qu’à partir d’un 10 km, c’est la filière énergétique aérobie qui est sollicitée. Cependant, si dans un premier temps, elle peut utiliser le glycogène pour fournir de l’énergie, cela ne pourra pas durer un temps infini. Ainsi, le mur du marathon est la parfaite illustration du passage de la filière aérobie à partir du glycogène à la filière aérobie à partir des lipides. Il faut avoir un gros mental pour réussir à maintenir une allure lors de la transition entre ces deux chaines de réaction.
Dans tous les cas, en ultra-trail, il faudra apprendre à courir grâce à l’énergie provenant des lipides. C’est cette filière énergétique qui permettra de tenir longtemps, très longtemps. On se demande toujours comment au bout de quelques dizaines d’heures, on peut continuer à courir sur le même rythme qu’après 5-6 heures de course. C’est tout simplement parce que les réserves en lipides sont immenses.
Ça ne signifie pas qu’il ne faut pas faire attention au ravitaillement. Cela reste indispensable pour fournir un effort dans la durée. Et le dernier ingrédient qui reste primordial pour avancer lors d’un ultra-trail est le mental. Pour cela, pas besoin de régime spécial, il faut juste avoir une incroyable volonté et une motivation débordante !
J’espère maintenant que vous en savez plus sur les différentes filières énergétiques et que vous saurez ce dont votre corps à besoin pour avancer et qu’est ce qu’il arrive quand il n’a plus de force.
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