Dimanche 8 avril, 8h32, je prends le départ du marathon de Paris 2018. Je commence à dévaler la plus belle avenue du monde. Léger faux plat descendant qui conduit une majorité des coureurs à partir plus vite que le rythme prévu. Mon objectif est assez simple pour ce début de course : doubler assez rapidement les meneurs d’allure de 3h15 pour s’extraire de la foule qui s’entasse autour d’eux et tenter de passer bien en dessous de ce temps.

Une foule de coureurs dans les rues de Paris
Un marathon dans la plus belle ville du monde
Le marathon de Paris est une course superbe au tracé magique. C’est une vraie visite touristique de la capitale. L’avenue des Champs Élysées, le Louvre, le Marais et Bastille permettent de s’échauffer. Puis c’est la découverte du premier bois de Paris, Vincennes, avec un passage devant le Château. Le semi est passé juste avant de revenir au cœur de Paris. C’est alors l’heure d’une nouvelle portion remarquable du parcours. Il faut cependant la gérer correctement et rester en forme avant le célèbre mur du 30e km. Un 2e passage par Bastille nous emmène ensuite sur les quais. Notre Dame de Paris et la Conciergerie peuvent être admirés sur l’île de la cité. Puis c’est au tour du musée d’Orsay sur la rive opposée. Les quais sont surtout l’occasion d’une ambiance formidable avec des spectateurs très présents qui portent les coureurs. Après quelques tunnels pour passer sous des ponts, on peut découvrir la tour Eiffel. Comme un symbole, elle marque également le début de la zone compliquée du marathon. A partir du 30e kilomètre, on s’éloigne du cœur de Paris pour se diriger vers le bois de Boulogne. Cette fin de marathon est réputée difficile : moins de spectateurs car moins facile d’accès, courte montée après le 33e kilomètre pour être bien sûr que l’on ressente le mur du marathon et fin en légère montée sur les 200 derniers mètres de l’avenue Foch.

5e kilomètre à Saint Paul

En tête de course, la foulée est rapide
En 42 kilomètres, le marathon de Paris est donc un condensé des lieux à voir de la capitale française. Mais c’est aussi une ambiance magique. Le rond point de l’étoile avec son arc de triomphe devient au petit matin le lieu de rendez-vous de dizaines de milliers de coureurs. La descente des Champs Élysées est un moment unique dont il faut profiter. On peut alors presque regretter les anciens départs sans vague où la marrée humaine se mettait à courir dès que possible après l’unique coup d’envoi de la course. Lancement plus photogénique et magique mais clairement moins agréable pour les coureurs. Cette formidable ambiance est aidée par un tracé qui permet facilement à un spectateur de voir des coureurs plusieurs fois. A citer notamment Saint Paul au km 5 et Pont Marie au km 24 séparés d’à peine cinq minutes de marche. Ensuite, Bastille où les coureurs passent tout simplement deux fois et où la foule est bien entassée. Enfin, une boucle dans le bois de Boulogne permet d’avoir facilement deux encouragements dans les derniers kilomètres. Ainsi, sur la majeur partie du parcours, et particulièrement dans le centre de Paris, les supporteurs sont présents en masse, et constituent un formidable support pour cette épreuve.
Au final, je comprends que ce marathon puisse faire rêver comme les grands autres marathons du monde : New-York, Boston, Berlin, Londres… Et quelle belle mise en valeur de notre capitale !
Une épreuve qui restera pour moi particulièrement dure
Je ne parle là pas seulement du marathon de Paris, mais du marathon en général. Je crains cette épreuve, et je continuerai à la craindre. Mais c’est aussi sûrement cela qui m’attire chez elle, alors que j’ai de moins en moins la volontés de faire des épreuves sur route. Mais alors pourquoi ? C’est la première distance où l’on épuise réellement ses ressources en énergie, ses ressources en glycogène. On doit passer par ce mur du marathon, tant redouté. Et c’est cette difficulté qui m’attire. Mon expérience m’a permis de vivre plusieurs fois cette baisse de régime, de savoir qu’on peut encore courir. Mais je n’ai jamais réussi à garder la même intensité sur toute la durée de la course. Et d’ailleurs, sur les deux derniers marathons que j’ai couru, Nice-Canne et Paris, cela a été très dur mentalement. Un vrai défi de terminer les derniers kilomètres sans s’effondrer. Et pourtant j’y ai effectué mes deux meilleures performances. Alors voilà pourquoi, même si courir un marathon est très différent de courir un ultra-trail, je serai encore attiré par ce format.
Cela fait environ deux heures que je cours, ce dimanche 8 avril. Je sais que je suis parti vite. Je ne sais pas si ça va se révéler payant mais je suis déjà content de l’avoir tenté. J’ai passé le semi sous les 1h34. La fatigue commence un peu à se faire sentir mais j’arrive à maintenir le rythme. Les sorties de tunnel ne sont cependant pas évidentes à passer. La course commence !

Coucou sur les quais

Les encouragements au bois de Boulogne sont un vrai moteur

Le mur du marathon dans les 10 derniers kilomètres
35e kilomètre, j’ai passé la difficulté du 33e en gérant la montée. Jusque là, mon rythme a baissé mais n’est pas ridicule. Je suis plus lent que sur le premier semi, mais j’avance quand même. Et puis c’est la surchauffe. Celle que je commençais à sentir depuis quelques temps. La météo du jour me joue des tours. J’essaie de m’arroser, de passer sous les jets d’eau qui aspergent les coureurs. Mais rien n’y fait, les crampes arrivent en même temps que l’énergie part. Je me mets dans ma bulle, celle qui me crée un rempart entre moi et mon environnement. Je ne fais plus attention au parcours et aux spectateurs. Je sais ce qui me reste à faire. J’oublie la montre, et avance en essayant de relâcher mes muscles pour faire partir les crampes des cuisses. Elle est bien là cette souffrance de fin de marathon. Les crampes m’obligeront à m’arrêter une fois. Je compte les secondes, 30s de perdu. Un meneur d’allure de 3h15 me dépasse, il doit être en avance. Mais dans le doute j’essaie quand même d’accélérer. J’arrive au kilomètre 42, plus que 200m. Mais je suis toujours dans ma bulle. Sans penser au temps, j’essaie de maintenir un rythme sur cette dernière ligne droite si dure. Et pourtant je cours bien contre le temps. Sans trop réaliser, un second meneur d’allure de 3h15 est à mes cotés. Mais ça y est c’est l’arrivée. Je peux arrêter ma montre, je suis heureux, j’ai à nouveau terminé le marathon de Paris !

Les 200 derniers mètres

Un finish au mental avec l’enjeu de passer sous les 3h15
Et puis je regarde ma montre : 3h 14min 47s. Ouf je ne me rendais pas compte que ça avait été si juste. Je pensais avoir vraiment pris de la marge sur ce chrono. Mais voilà, quand on se bat sur la fin d’une telle épreuve, on peut vraiment perdre du temps. J’ai tenté un gros coup en partant sur une allure permettant de passer sous les 3h10 alors que ma préparation était basée sur un objectif initial de 3h15. Je n’ai pas tenu. Juste après l’arrivée, on ne peut pas empêcher ce petit sentiment de frustration causé par tant de perte de temps sur le second semi. Mais c’est aussi cette réelle difficulté due à la distance qui fait que j’aime cette épreuve. Mais je continuerai aussi à la respecter et à la craindre.

La joie d’être finisher !
Une fois de plus, je n’ai pas un souvenir précis de la fin du parcours de ce marathon. Et surtout je me suis mis tellement dans ma bulle que j’ai réussi à ne pas voir une amie venue m’encourager dans le bois de Boulogne, et ma copine placée à 200m de l’arrivée pour me supporter. Honte à moi !
Une course malheureusement de plus en plus marketing
Le marathon de Paris, c’est malheureusement aussi une formidable machine à cash pour ASO. C’est un des principaux marathons au monde qui profite beaucoup à une entreprise privée. Le prix de l’inscription est devenu faramineux. Les quelques premières places pour 2019 ouvertes la semaine ayant suivi le marathon sont à 89€. Et c’est un prix d’appel ! Et comme si cela ne suffisait pas, depuis quelques années, ASO utilise le naming. Le marathon de Paris est devenu le Schneider Electric Marathon de Paris. Je pense qu’il est important pour une grande capitale comme Paris qu’elle ait un grand marathon dont l’organisation est impeccable. Mais qu’est ce que j’aimerais que celle-ci se fasse dans le cadre associatif comme c’est le cas encore de quelques belles courses.
Cet événement est aussi très marketing. La mode de la course à pied n’a jamais été aussi forte. C’est devenu un véritable phénomène de société. Et les marques l’ont bien compris. Le salon associé à la remise des dossards est devenu le salon du running. Il ne s’adresse plus seulement aux marathoniens cherchant une nouvelle paire de chaussure ou une prochaine course. Cela n’a plus rien à voir avec ce que j’avais connu en 2010 et en 2012. Les marques s’adressent à un public large cherchant du matériel à la pointe de la technologie, mais surtout à la pointe de la mode. La course à pied est devenue le running et s’est entièrement intégré à la société de consommation. Si cela permet d’avoir un marché dynamique du matériel et une émulation des innovations, il faut quand même pour ceux qui le souhaite ou qui ont des moyens limités, que ce sport puisse rester un sport peu onéreux, qui a la beauté de mixer les milieux sociaux.

Récupération du dossard au salon du running
Le marathon restera pour moi une distance reine. Et Paris peut être fier de son épreuve. Elle sait apporter de la joie et de la fierté à des milliers de coureurs. Et je fais parti de ceux là. Alors amis coureurs, si vous hésitez à franchir le pas du marathon, osez. Et Paris vous accueillera parfaitement pour relever ce magnifique défi !
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