J’ai souvent répété que l’état de forme pendant un ultra-trail était une succession de hauts et de bas. Lorsqu’on est dans le dur, il ne faut pas paniquer, continuer à avancer comme on peut, et attendre que l’énergie revienne un peu. Samedi 26 mai, pendant la MaxiRace à Annecy, ma forme m’a quitté après la mi-course. Elle n’est jamais revenue…
La MaxiRace, un vrai trail de montagne
En 2014, j’ai découvert le trail longue distance avec cette course. Cette année, j’ai souhaité m’y confronter à nouveau, et y retrouver la joie et la souffrance que j’y avais vécues. La MaxiRace à Annecy est le format de trail qui me correspond parfaitement : du dénivelé, des sentiers techniques, des vues incroyables, et une distance longue mais qui se parcourt sur une seule journée !
Tous les ingrédients sont réunis sur cet itinéraire qui fait le tour du lac d’Annecy, en passant par quelques sommets. 84km et 5200m de dénivelé positif font de ce trail une course exigeante où il faut se dépasser. Grosso modo, 4 bosses sont au programme : le Semnoz, le col de la Cochette, le rock de l’Encrenaz et pour finir le Mont Verrier. Les deux premières se situent sur la première moitié du parcours, avant Doussard qui se trouve à l’exact opposé du lac par rapport à Annecy. Les deux suivantes se trouvent sur la seconde moitié du parcours, sur le chemin du retour. Cette répartition a l’avantage de faciliter ses plans de course et son anticipation des difficultés. La majeure partie du tracé est constituée de sentiers plus ou moins techniques. Quelques rares passages peuvent nécessiter l’aide de cordes fixes pour grimper ou descendre mais beaucoup d’endroits permettent de relancer, à condition d’avoir les jambes qui le permettent. Bref un beau compromis pour ce que je considère être un vrai trail de montagne.
Cette course bénéficie aussi d’une organisation bien rodée, autour de bénévoles passionnés et attentionnés. Attention toutefois, la course ne propose que 3 ravitaillements liquides et solides à côté de quelques points d’eau complémentaires. Il est donc nécessaire de gérer la course en semi-autonomie pour s’alimenter correctement. Le départ et l’arrivée au bord du lac à Annecy offrent un décor splendide. Vous l’aurez compris, j’adore cette course et était très heureux de la courir pour la seconde fois alors qu’habituellement je ne refais pas un trail que j’ai déjà couru.

François d’Haene sur le salon

Remise du dossard de la MaxiRace
Un début très bien maîtrisé
Samedi, 5h du matin, je m’élance de la plage d’Albigny, entouré de 1500 coureurs et de quelques fumigènes. Le défi est simple : faire le tour du lac, dans un temps moindre qu’il y a 4 ans, et m’apporter de la confiance pour la Diagonale des fous qui m’attend en octobre prochain.
Les trois kilomètres de plat pour sortir de la ville ne suffisent pas à étaler suffisamment le peloton. Il faut donc, comme c’est souvent le cas pour les trails populaires, attaquer la première montée et les premiers sentiers au rythme lent d’une file ininterrompue de coureurs. Mais ce n’est pas grave et permet de commencer prudemment la course.
J’atteins donc le Semnoz quelques heures après le départ, et enchaîne la première descente en trottinant. Déjà le peloton s’étire ce qui permet d’être plus à l’aise. La seconde bosse et seconde descente s’enchaînent bien. Je me dirige lentement vers Doussard et la mi-course. Avant d’y arriver, presque 3km de plat permettent de bien juger son état de forme. J’ai les jambes fatiguées mais je trottine facilement. Je viens donc de finir un marathon, et je me prépare à me lancer dans le second.
J’achève cette première partie de course en moins de 7h ce qui me satisfait beaucoup. Je suis dans le même état physique qu’il y a quatre ans, mais avec une plus grande expérience. Ma course devrait être réussie ! Oui mais voilà, rien ne se passe toujours comme prévu…
A Doussard, je prends le temps de me poser un peu pour manger et bien m’hydrater. Je donne aussi quelques nouvelles à mes proches et via sms et Instagram. 10-15 min de halte, pas plus, et je repars pour passer mon après-midi dans la montagne !

Course en descente pendant la MaxiRace

L’orage ne passe pas loin pendant la MaxiRace
Puis mon corps qui ne veut plus
Avant d’attaquer la première très longue montée de la seconde partie, un peu de plat doit être parcouru. Tout comme avant le ravitaillement, je trottine pour essayer de relancer la machine. Mes jambes ne sont toutefois pas très fraîches. Puis la montée est là, mais les jambes ne reviennent pas et surtout mes forces semblent au plus bas alors que le ravitaillement aurait dû me requinquer un peu. Sans paniquer, je poursuis lentement mon ascension. Des moments de moins bien arrivent forcément sur une telle course, et il suffit d’attendre que ça passe. À ce moment de la course, il est aussi important de ne pas trop faire attention à tous les coureurs qui doublent à un rythme élevé. La très grande majorité sont des relayeurs ayant tout juste commencé leur relais.
L’arrivée au point d’eau au niveau de la Côte Montmain me confirme que mon état de forme n’est vraiment pas bon. Je n’arrive pas à bien m’alimenter et la digestion est difficile. Il faut que je fasse une sieste. Je m’étends à l’ombre et je ferme les yeux. Je réalise que je vais devoir laisser filer la course, je n’ai pas la force nécessaire pour espérer maintenir un bon rythme. Il faut maintenant gérer au mieux mon état pour continuer à avancer. Je commence mon chemin de croix pour rallier l’arrivée.
La montée vers le Rock de l’Encrenaz n’en finit pas. Je savais qu’en petite forme, il me faudrait environ 3h pour avaler le dénivelé. C’est finalement 4h qu’il me faudra pour arriver en haut. Un pas lent, de longues poses, et un moral pas au mieux. Et pourtant le haut de cette longue montée est un des endroits les plus beaux du parcours. Des chèvres viennent se mêler aux coureurs, et la dernière partie raide qui nécessite des cordes fixes permet une vue magnifique sur le lac ! Je ne peux en profiter qu’à moitié.

Ascension sur la MaxiRace

Plus d’énergie pendant une montée
Le reste du parcours ne sera que peine. Je ne récupère pas. Je suis toujours vide d’énergie, comme une hypoglycémie qui dure. Par moment, des fourmis parcourent tous mes membres, de haut en bas, m’obligeant à m’arrêter manger quelques aliments que je ne digère pas. Lorsque je bois ou je me nourris, l’envie de vomir se fait de plus en plus forte, jusqu’à ce que je finisse par rendre tout ce que j’ai dans le ventre. Mon corps ne veut pas de l’énergie que j’essaie de lui donner !
Impossible de courir en descente, une marche très lente en montée, je n’avance pas. La dernière ascension est terrible sans que je n’arrive à en voir la fin. Et pourtant la partie sur la crête permettant de voir le lac et Annecy en contrebas est magnifique. Les heures passent, le soleil se couche, je vais finir de nuit.
Je n’essaie presque plus de relancer, même dans la dernière descente. J’arrive à Annecy pour entamer le dernier kilomètre déçu par ma course manquée. Je fais à peine l’effort de trottiner sur le dernier kilomètre. L’arrivée se fait sans réelle joie, soulagé quand même d’en avoir fini avec la course…

Arrivée de la MaxiRace
Le bilan
Le lendemain fût encore assez compliqué avec une vraie difficulté à m’alimenter et à m’hydrater. La récupération a ensuite été assez rapide. Après quelques jours, on fait le bilan de la course. Je reste très déçu car je ne cours quand même pas souvent ce genre de course et il est difficile d’accepter de passer à côté. Mais je pense que je vais beaucoup apprendre et que cela me sera fortement utile pour mon prochain grand défi : la Diagonale des fous.

Une chèvre sur le parcours de la MaxiRace
Je ne sais pas encore aujourd’hui quelle est la cause principale des problèmes digestifs un peu extrêmes que j’ai vécus et de l’impossibilité de reprendre des forces. La fatigue des semaines précédentes, la chaleur, ma façon de m’alimenter… Je ne pense pas qu’une seule de ces causes suffit à expliquer ma défaillance. Mais sûrement, ce jour là, un trop grand nombre de facteurs négatifs se sont cumulés.
En tout cas, je vais prendre le temps d’analyser les événements et de progresser sur la compréhension des causes. Je vais sûrement aussi me servir de cette expérience pour améliorer mon matériel et mes ravitaillements dans l’optique de mieux m’hydrater et de mieux m’alimenter en course.
C’est donc sur cette expérience difficile que je vais attaquer la préparation du Grand Raid de la Réunion !!!!
2 Commentaires
Très beau récit ! J’ai revécu la course en le lisant. Dommage pour la mauvaise surprise… mais ça enrichit les expériences comme tu le dis 😉
Merci beaucoup ! 🙂