Ça faisait quelques temps déjà que j’avais envie de parcourir le GR20 dans son intégralité. Ce chemin de grande randonnée est réputé pour être un des plus difficiles d’Europe. Il relie Calenzana à Conca et est long de 180km pour plus de 13000m de dénivelé positif. Certains de ses passages sont très aériens et montagneux. Les conditions météo peuvent rendre la randonnée difficile et même dangereuse.
En septembre 2016, j’ai eu l’occasion de poser une semaine de vacances et me suis lancé dans le projet de compléter seul le parcours en 5 jours. Cela signifie que, chaque jour, il faut réaliser trois étapes classiques de ce GR qui habituellement se finit en quinze jours. Une préparation un peu spécifique est nécessaire et un matériel léger est indispensable. Chaque grosse journée commence tôt le matin et se finit tard dans l’après-midi ou en début de soirée. Le rythme est alors assez proche de celui du trail, avec des moments d’euphorie face au lieu magnifique, mais aussi de doute face à la difficulté et de fatigue.
La partie Nord du GR20
La partie Nord du GR20 est la partie la plus montagneuse, la plus verticale et la plus technique de la randonnée. C’est aussi celle que j’ai nettement préférée. Ainsi, je suis parti un lundi matin vers mi-septembre de Calenzana pour réaliser ce petit rêve d’enfin voir tout le GR20.
1er jour : Calenzana-Asco
La première journée est aussi celle où l’on quitte la civilisation. Après une nuit au gîte municipale de Calenzana à échanger avec des randonneurs qui vont se lancer comme moi sur le GR20, il fût temps de prendre un bon petit déjeuner dans la boulangerie du village et de rejoindre le départ. Quand on rencontre les premiers panneaux indiquant le GR et la destination finale, c’est déjà un peu d’émotion qui s’installe. Le début du sentier fait rapidement monter en altitude au dessus de Calenzana, et s’éloigner du village. J’engloutis la première étape jusqu’au refuge d’Ortu en quelques heures seulement. Juste le temps de rattraper les quelques randonneurs partis plus tôt avec de très gros sacs, et regarder les magnifiques panoramas donnant sur la mer derrière moi. La seconde étape de la journée se passa également très bien. Je m’enfonçais alors clairement dans la montagne, avec quelques vues superbes sur l’immensité montagneuse de l’intérieur de la Corse. Au refuge de Carozzu, il fût temps de manger un plat chaud, avant de repartir assez rapidement. La dernière partie de la journée commença par un très joli pont suspendu avant d’attaquer une longue montée sans sentier clairement défini. Il est indispensable de bien chercher les marques indiquant le GR. La fatigue commençait à se faire sentir. Une dernière grande descente m’emmenait dans l’ancienne station de montagne d’Asco pour ma première nuit sur le GR20.
Cette première journée est une très belle mise en jambe. Le GR20 permet très rapidement d’être plongé dans le décor de la haute montagne. Déjà des vues exceptionnelles se sont offertes à moi. Mais pour le mériter, un dénivelé non négligeable a dû être grimpé, avec, par moment, des sentiers peu évidents, voir inexistants, où il faut faire bien attention au marquage et savoir utiliser les mains.
2e jour : Asco-Mangano
Dès le début, je savais que cette étape serait la plus longue et la plus dure de mon périple. Suite à un accident mortel survenu en 2015 dans le cirque de la solitude, cette portion mythique du GR20 a été fermée. Le nouvel itinéraire est moins technique mais plus long et monte plus en altitude. Cela donne une très longue portion quand on triple les étapes.
En prévision d’une grosse journée, je me suis levé aux aurores et ai attaqué l’étape à la lampe frontale. Il est alors moins évident de trouver les marques du GR sur ce nouvel itinéraire nouvellement balisé. Au lever du jour, j’attaquais la longue montée vers le nouveau point haut du GR à 2600m d’altitude, à deux pas du sommet de la Corse, le Monte Cinto. Cette première montée est longue et raide, avec quelques passages techniques nécessitant des chaînes. Après une descente assez verticale, on rejoint le premier refuge de cette seconde journée, Tighjettu. Une rapide pause car la route est longue et je suis reparti avec un compagnon de route pour cette prochaine portion jusqu’au refuge Ciottulu. J’y déjeunais avant de me remettre en route rapidement car le chemin était encore long. Ce refuge se trouve juste en dessous d’une arrête, et le sentier repart vers la vallée en contrebas. Au moment de partir, le tonnerre se mit à gronder derrière moi, m’incitant à ne pas traîner et même à courir. Cette dernière partie de journée, moins technique car passant en plaine, s’est alors faite en bonne partie sous la pluie, avec l’orage menaçant au loin. Cela ne m’a pas empêché de profiter d’un très beau passage au lac de Nino. La lumière de fin d’après-midi, perçant à travers les nuages sombres, était magnifique. En fin de journée, l’arrivée au refuge de Manganu se fait désirer. J’y suis finalement arrivé bien fatigué juste avant l’heure du repas.
Cette seconde journée fût magnifique. J’étais au départ très déçu de ne pas pouvoir traverser le cirque de la solitude, qui est le passage emblématique du GR20. Mais le nouvel itinéraire est quand même très beau. J’ai eu des conditions climatiques difficiles dans l’après-midi avec une grosse pluie. Mais ma position dans la vallée m’éloignait à priori du danger de la foudre qui tombait aux alentours. Et ma chance fût d’avoir des éclaircies sur le lac de Nino, que j’ai eu pour moi tout seul en fin d’après-midi.
3e jour : Manganu-Vizzavone
La 3e journée est la dernière de la partie Nord du GR20. J’ai également décidé d’attaquer très tôt la journée pour ne pas arriver trop tard à Vizzavone et pouvoir profiter des bassins naturels où l’on peut se baigner avant le village.
La première montée, que je commençais à la lampe frontale, est raide. Elle permet d’atteindre la brèche de Capitello par derrière laquelle on découvre les lacs de Melo et Capitello. Cette partie est l’endroit que j’ai préféré dans le GR20. Quand on découvre, par la brèche ces lacs d’altitude en contrebas, on est émerveillé. On ne se rend alors pas compte que les deux lacs sont à des altitudes très différentes. Heureusement, le sentier du GR, nous permet de faire le tour des lacs par une ligne de crête pour changer de point de vue. L’itinéraire est fabuleux avec des panoramas à couper le souffle. Fabuleux, mais technique aussi. Des chaînes permettent de descendre des murs verticaux de 2-3m. Mais c’est ça aussi qui fait le charme se l’endroit. Lorsqu’on a fini de faire le tour des lacs, et descendu un peu en altitude, on s’aperçoit très bien que ceux-ci ne sont pas du tout au même niveau. Et au loin, on peut observer la petite brèche d’où on arrive. Le premier refuge de la journée, le Petra Piana, ne se situe pas longtemps après. Le sentier continue, en longeant par moment des piscines naturelles qui invitent à la baignade. Une omelette vite avalée au refuge de l’Onda, et j’attaquais la dernière difficulté de la journée, l’arrête de la Pinte Muratellu. Une vue dégagée permet de bien profiter de cette ascension. Ensuite, la première partie de la descente est technique, en partie dans des éboulis. Il est dur d’aller vite, mais l’envie d’arriver m’a permis de continuer à maintenir un bon rythme. On sent qu’on se rapproche de Vizzavone, seul village traversé sur le parcours, parce que le sentier devient plus confortable, emprunté par beaucoup de monde. En effet, les gens viennent ici pour les cascades des anglais, qui se trouvent sur le GR20 en fin d’étape. Ce sont des séries de cascades, reliant des piscines et toboggans naturels. Il y a du monde mais l’endroit est magnifique. Pour finir ma journée, je me suis choisi une petite piscine pour me tremper les jambes : un bien fou après déjà trois journées d’achevées.
Cette troisième journée fût pour moi ma préférée. Les lacs de Melo et Capitello sont magnifiques et le sentier qui y passe, aérien et technique, est très agréable. Après cela, tout l’itinéraire est très joli, et les piscines naturelles, juste avant l’arrivée au village de Vizzavone, permettent de parfaitement clôturer cette journée.
La partie Nord du GR20 s’achève alors au bout de trois jours. Cette partie est de loin la plus aérienne, la plus montagneuse, et la plus technique. Les journées sont longues, et plus particulièrement la seconde. Chaque jour, c’est entre 30 et 35km qui sont au programme avec beaucoup de dénivelé positif. Quelques montées sans fin, avec des passages techniques, où l’aide de chaînes est nécessaire, doivent être surmontées. Il y a sur cette partie beaucoup de passages sans sentier. Il faut alors faire attention à bien suivre les marques rouges et blanches du GR pour passer au bon endroit entre les rochers. On peut quasiment voir à chaque instant la prochaine marque dès lors qu’on en passe une. Si ce n’est pas le cas, et qu’au bout de 2-3 minutes, aucune nouvelle marque n’apparaît, il ne faut pas hésiter à rebrousser chemin pour retrouver le balisage. Cela arrive assez régulièrement sur tout l’itinéraire.
Au final, au bout de trois jours, la fatigue était déjà bien installée. J’étais toutefois très heureux de ce que j’avais vécu et découvert. Je savais la suite moins technique mais avec des distances plus longues à parcourir sur les deux dernières journées qui m’attendaient. Le programme à venir était encore beau avant la fin de mon aventure.
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Trop bien ton blog